Coups de coeur du mois de mai

 


Coups de coeur du mois de mai


 

En mai, fais ce qu'il te plaît...

Ce que je fis. Résultat : un bouquet de BD plutôt exotique, du politique, du scientifique, du poétique, du fantastique.

 

Egon Schiele - Vivre et mourir - Xavier Coste

 

© Xavier Coste / Casterman

Titre : Egon Schiele - Vivre et mourir

Scénariste : Xavier Coste

Dessinateur : Xavier Coste

Editeur : Casterman

Date d'édition : Mai 2012

 

PITCH DE L'EDITEUR

Egon Schiele, 1890 – 1918.
Vingt huit années d’existence seulement, et une si grande influence sur l’art du XXe siècle… C’est ce destin d’exception que retrace la première bande dessinée de Xavier Coste – lui-même n’a que 22 ans lorsqu’il réalise cet album : la trajectoire tumultueuse et fascinante d’un météore de la peinture, tout en contrastes, en fulgurances, en excès.
L’ouvrage se concentre volontairement sur les dernières années de la vie du peintre autrichien. L’essor d’un talent, d’abord : son parrainage confraternel par Gustav Klimt, son appétit de conquête et de femmes, son goût de la provocation, ses premiers succès. Bientôt suivis par ses échecs : brièvement emprisonné pour pornographie, Schiele se range, s’embourgeoise… Le déclenchement de la Grande Guerre, puis la disparition de presque tous ses proches achèveront d’éteindre sa flamme, avant que la grippe espagnole ne l’emporte à son tour.
Un portrait biographique séduisant et personnel – et l’évidence d’un talent graphique à suivre.
 

 

Un très jeune auteur à suivre : à 22 ans, Xavier Coste réalise une première bande dessinée d’une maturité étonnante et s’attaque à la biographie d’Egon Schiele.

 

Son œuvre s’ouvre sur un Egon Schiele impétueux et insolent qui claque la porte de l’Académie des Beaux-Arts de Vienne et envoie au diable les conseils et le conformisme de son professeur...

« Je n’ai que faire de l’avis d’un raté »

 

…qui n’a que faire de son public…

« Vous êtes du genre torturé jeune homme. Artistiquement, il y a des qualités. Sur le plan technique, ça laisse à désirer… Mais surtout la question qui se pose… qui achèterait ce genre de choses […] qui souhaiterait accrocher des corps nus et livides dans son salon ? Soyons sérieux »

 

… prêt à tout pour exprimer sa vision de la pornographie…

« je vais faire tremble le bourgeois […] je persiste à assumer ce que j’aime faire… le sale, le nu, le sexuel. »

 

… à la prolixité et à la précocité exceptionnelles.

« Les toiles se succédaient sur mon chevalet. Je produisais comme on respire. »

 


©
Xavier Coste / Casterman

Elle se clôt dans des  effluves putrides de grippe espagnole et dévoile un Egon Schiele transformé par un passage en prison et peu connu du grand public…

« Il avait fallu que je me retrouve en prison, seul, pour me rendre compte que j’avais besoin des autres. »

 

… qui, amèrement, reconnaît ses erreurs, se repent et décide de tourner le dos à son existence d'homme à femmes et d’incitation à la pornographie...

« Tout était en place pour une existence petite bourgeoisie. »

 

… et que le malheur fustige trop tôt : la guerre, la mort de sa femme, enceinte d’un premier enfant qui ne verra pas le jour, la mort de Klimt, qui est comme le deuil d’un second père. 

« Je me sens comme prisonnier d’un cauchemar. »

 

Les tourments du jeune peintre, sa volonté de changement et son génie sont étouffés prématurément par la grippe espagnole.

« C’est triste et il est difficile de mourir. Mais ma mort ne m’apparaît pas plus pénible que ma vie… ma vie qui a offensé tant de gens. »

 

La mise en scène choisie par Xavier Coste navigue entre la vie personnelle et tourmentée d’Egon Schiele et le cheminement de son œuvre ; elle cible non pas l’exhaustivité biographique mais ce basculement peu connu entre le jeune Egon à la réputation sulfureuse et l’homme sorti de prison qui n’a pas eu le temps de revenir sur ses erreurs passées.

 

Quant au dessin, c’est un vrai plaisir et c’est brillant.

Le trait aux infinies nuances de brun, d’une étonnante élégance n’en est pas moins anguleux, torturé, tendant parfois vers l’abstraction. Les silhouettes émaciées et maladives se succèdent aux carnations livides et aux improbables poses nerveuses et pornographiques ; le tout formant un écho pictural omniprésent à l’œuvre d’Egon Schiele.

Le jeu de couleurs épouse le bouillonnement artistique et politique qui caractérise l’époque d’Egon Schiele… et traduit également les heurts de la vie de l’artiste : les teintes violacées, grises presque morbides reflètent l’écœurement du jeune peintre lors de son retour à Vienne ; les larges dessins élégants, très blancs contiennent l’immense désœuvrement du jeune peintre lors de son passage en prison ou lors de la mort de Klimt.

 

A suivre avec impatience, du même auteur : une nouvelle BD en cours consacrée à la biographie d’Arthur Rimbaud.

 

 

Dix questions posées à Xavier Coste ici.

 

© Xavier Coste / Casterman Egon Schiele - Autoportrait

 

 

Campagne présidentielle - Mathieu Sapin

 

© Mathieu Sapin / Casterman

Titre : Campagne présidentielle

Scénariste : Mathieu Sapin

Dessinateur : Mathieu Sapin

Editeur : Dargaud

Date d'édition : Mai 2012

 

PITCH DE L'EDITEUR

Entre le 22 octobre 2011 et le 6 mai 2012, Mathieu Sapin a accompagné François Hollande pendant sa campagne, au plus près du candidat. Réunions stratégiques, déplacements, meetings et confidences exclusives : le BD reporter livre un document passionnant sur les coulisses d'une campagne présidentielle à nulle autre pareille. Après Feuille de chou et Journal d'un journal (Delcourt), ce spécialiste du reportage dessiné s'attaque à la vie politique et à ses coutumes secrètes.

 

 

Petite souris chez les éléphants, dessinateur désormais célèbre des coulisses des plateaux de tournages et des campagnes, Mathieu Sapin s’est glissé dans l’ombre de François Hollande pendant sa campagne : il a tout vu, tout entendu, tout croqué…

 

 

Les visites d’usines au Creusot, les déplacements en seconde classe (ce serait ballot d’être le « candidat des riches »), le QG de campagne, le meeting au Bourget, la présentation du programme, les repas d’élus, Ed le rouge et François le rose, le Hollande-tour et ses 67 étapes, les sondages et résultats des deux tours vécus par l’équipe de campagne, le débat et l’anaphore improvisée de François Hollande…

 

... Les rouages de l’organisation de campagne, les impromptus, les gaffes vécues de l’intérieur (ah… la taxation des revenus… mensuels de plus d’un million …), la gestion des imprévus, les inévitables dérapages sur Twitter, aujourd’hui impardonnables et les improvisations heureuses ou hasardeuses de François Hollande.

© Mathieu Sapin / Casterman

 

... Le malin génie de la communication et du storytelling, le contrôle de l’image, la fabrique des décors et la création de symboles, les équipes de bloggers…. Et la phobie de Manuel Valls pour Twitter !

 

 Et... bien sûr, les off de l’équipe de campagne (dont les plus gratinés sont celles d’Arnaud de Montebourg) et la campagne de l’autre côté du miroir…
Un François Hollande vautré, en chaussettes et chemise ouverte , ne sachant résister à des petits fours diablement tentateurs, dans la loge d’une émission télévisée ... échappant de justesse aux caméras télévisés (mais pas à Mathieu Sapin !).

 

Mathieu Sapin n’est ni journaliste, ni féru de politique comme le précise, très honnêtement sa préface… Mais c’est bien sa bonhommie faussement candide de français faussement moyen qui séduit le lecteur. Ne vous y trompez pas, le résultat est plutôt acéré et indiscutablement brillant malgré l’absence de volonté de nuire ou de prendre position.

© Mathieu Sapin / Casterman

 

Graphiquement… on est plongé dans le style bouillonnant presque brouillon du carnet de dessins, dans les croquis et les notes qui s’enchevêtrent et dans le sacré coup de crayon de Mathieu Sapin qui n’épargne aucun des membres de l’équipe de campagne de François Hollande.

 

A force d’insistance sans doute un peu pénible – et parrainé par Libération – l’auteur a réussi l’exploit de se faire accepter par toute l’équipe, de sortir de la meute de journalistes et a bénéficié d’un accès très très privilégié à la campagne. Au point d’assister aux réunions de crise de l’équipe de campagne ou de suivre aux côtés de François Hollande les résultats du second tour.

… Malgré un Manuel Valls, « roi du cassage », un brin  agressif… « Mathieu Sapin qui n’a pas de rapport avec Michel Spain. Si ce n’est la calvitie ».

 

Il a certainement tout vu, du moins bien plus que ne l’ont fait les journalistes… de là à dire qu’il a tout croqué….  Ne rêvons pas, on imagine assez bien les innombrables coupures…
« C'était acrobatique car j'avais deux contrats à honorer. Celui passé avec l'équipe de campagne : il y avait le « off », que je pouvais publier dans Libé, et le « vraiment off », ce que je m'étais engagé à ne publier que dans l'album, une fois la campagne terminée. J'avais aussi les chroniques pour Libé. Bref, il me fallait à la fois du recul et des réactions à chaud. » (extrait de l’interview de Mathieu Sapin réalisée par Nice Matin).

© Mathieu Sapin / Casterman

 

Malgré tout… en plus d’être un excellent documentaire bourré d’humour sur la campagne présidentielle de François Hollande, Mathieu Sapin a su tirer profit des avantages inhérents au média bande dessinée, d’apparence plus inoffensive que les autres médias, pour réaliser un travail à n’en point douter bien mieux documenté et bien plus drôle que ne sauraient le faire les autres supports médiatiques.

 

 

A voir : l’interview de Mathieu Sapin réalisé par Europe 1 dans l’émission « Des clics et des claques »

(de 25:15 à 40:35)

 


Des clics et des claques - 22/05/2012 par Europe1fr

  

 

 

Jack l'éventreur - Tome 1 - Les liens de sang - François Debois & Jean-Charles Poupard

 

© François Debois / Jean-Charles Poupard / Soleil

Titre : Jack l'éventreur Tome 1

Les liens de sang

Scénariste : François Debois

Dessinateur : Jean-Charles Poupard

Editeur : Soleil

Date d'édition : Mai 2012

 

PITCH DE L'EDITEUR

Nous avons tous en nous une part de folie qui ne demande qu'à être libérée.

Londres 1888.

Le Mal s’abat sur la capitale européenne, un monstre sanguinaire tue et dépèce des prostituées dans les bas-fonds de Whitechapel, on le surnomme Jack l’Éventreur. À Scotland Yard, l’inspecteur Frederick Abberline et son équipe mènent l’enquête. Entre lettres anonymes, dénonciations calomnieuses, milices qui font la loi et le peu d’indices qu’il recueille au fil de ses virées nocturnes, le commissaire s’égare…
D’autant qu’il est secoué par les démons de son passé trouble. George Godley, son assistant, s’interroge sur son supérieur. D’inquiétantes coïncidences l’amènent à penser qu’Abberline est lié à tous ces meurtres…
Tous les deux sont-ils prêts à découvrir l’insoutenable vérité ?

 


Ah… le mythe de Jack l’éventreur n’en finira donc jamais d’inspirer les artistes, et le neuvième art n’y échappe pas… Souvenez-vous de l’excellent From Hell d’Alan Moore (qui a inspiré le film éponyme avec Johnny Depp) et du surprenant Peter Pan de Loisel.

S’attaquer derechef au fait divers londonien le plus éternel semblait donc téméraire. Mais ce premier tome annonce une nouvelle version captivante…

 

Et, de fait, tout y est :

 

L’ambiance : les coupe-gorges, les ombres angoissantes, les ruelles crasseuses, la laideur de la misère et de la prostitution. La ville de Londres de la fin du XIXème siècle est esthétiquement et superbement mise en scène par Jean-Charles Poupard. Dédale de ruelles se superpose aux nouvelles constructions urbaines – à noter, la très belle représentation de la construction du pont de la tour de Londres. Si le dessin, très réaliste, est très fidèle au style « franco-belge », la mise en page, le cadrage et le rythme sont saisissants et les quelques digressions expressionnistes sont délectables.

 

 
© François Debois / Jean-Charles Poupard / Soleil Crayonné de Jean-Charles Poupard

 

Les jalons historiques, le contexte social et politique et les principales composantes de l’énigme sont merveilleusement retranscrits… de quoi régaler les amateurs de Jack l’éventreur qui reconnaîtront les victimes, les principaux suspects, les enquêteurs, l’époque, les décors, l’embrasement de la rue mené par la police du peuple.

 

Malgré cette fidélité au cadre historique, les auteurs parviennent à aborder le mythe de Jack l’éventreur à travers un angle de vue nouveau et très prometteur pour les tomes qui se font déjà désirer.

 

 

L’intrigue est centrée sur le personnage de Frederick Abberline, l’inspecteur en charge de l’enquête.

Alors que la clé de l’énigme semble résolue dès les premières planches, à la lecture du carnet de Frederick Abberline…

« Moi, Frederick Abberline… Je suis Jack l’éventreur »

... le récit s’éloigne très vite de cette possibilité. Les auteurs sèment le doute, baladent le lecteur et les preuves s’entremêlent. Et le mystère est aussi inaltéré que frustrant à la fin de ce premier tome...

Une seule piste : les prémices de la psychanalyse cristallisées dans la parution de l’œuvre de R. L. Stevenson, L’étrange cas du Docteur Jekyll et de M. Hyde (écrit en 1886, soit deux ans avant les faits) semblent prendre une place prépondérante dans la suite du récit.

 

A suivre...

© François Debois / Jean-Charles Poupard / Soleil

 

 

Découvrez ici une interview du dessinateur, Jean-Charles Poupard et quelques clés inattendues pour la suite de l'énigme...

 

 

Une bande-annonce, malheureusement très courte :

 


Bande annonce Jack l'éventreur Tome 1 par SoleilProductions

  

 

 

Moments clés de l'Association - François Ayroles

 

© François Ayroles / L'Association

Titre : Moments clés de l'Association

Scénariste : François Ayroles

Dessinateur : François Ayroles

Editeur : L'association

Date d'édition : Mai 2012

 

PITCH DE L'EDITEUR

En 2005, François Ayroles publiait ses 28 Moments-clés de l’Histoire de la bande dessinée (Le 9e monde). En 2008, il nous montrait encore son talent de cartoonist dans les Nouveaux moments-clés de l’Histoire de la bande dessinée (Alain Beaulet). Désormais auréolé du titre de meilleur fournisseur de private jokes de l’histoire de l’art séquentiel, il remet ses gants pour nous livrer ses Moments-clés de L’Association.

En 50 dessins, François Ayroles dresse un portrait tour à tour tendre, ironique des auteurs majeurs de L’Association. Tout y passe, de la gestation des grands classiques à la découverte des vertus de l’humour autrichien ou finlandais, sans oublier les affres du succès et les joies de la vie associative. Un bon moyen de se remémorer plus de vingt années d’édition et de bande dessinée, en compagnie de l’humour mordant et absurde de François Ayroles.

 

 

Une cinquantaine de dessins - dont beaucoup de private jokes - sur le parcours de L'Association.

L'auteur revient sur les grandes étapes de la vie palpitante de cette maison d'édition : les fondateurs, la création des statuts, les embauches, la conquête du monde, les collections (e.g. la bande dessinée sous contrainte...), la grève de 2011, les rebondissements qui s'en suivirent... et sur les auteurs qui ont marqué la vie de L'Association.

 

© François Ayroles / L'Association

L'occasion de revenir sur la vie de cette maison d'édition très particulière qui domine la scène de la bande dessinée alternative depuis sa création, en 1990.

Le rayonnement et l'influence de L'Association sont infiniment plus larges que le poids purement économique de la maison d'édition dans le paysage éditorial de la BD. Elle a très largement favorisé le foisonnement créatif que l'on constate aujourd'hui et a été le précurseur des grandes tendances de l'histoire contemporaine de la bande dessinnée : le développement de nouveaux formats, l'évolution des graphismes, la narration muette, les reportages dessinés, les récits de voyages, la narration introspective, l'atténuation de la frontière entre l'illustration et la bande dessinée, etc.

L'Association a également contribué à l'émergence des auteurs clés dans l'histoire récente de la bande dessinée - dont la plupart sont croqués avec humour par François Ayroles : Lewis Trondheim, Riad Sattouf, Marjane Satrapi, Julie Doucet, Jean-Christophe Menu, Joann Sfar...

 

Les innombrables et inextricables péripéties de 2011 et le départ d'un des fondateurs clés, Jean-Christophe Menu, ont fait plâner une sombre menace sur l'avenir de cette belle maison. Espérons que ces nuages noirs sont définitivement chassés... La maison d'édition, qui a conservé son statut d'association, a été reprise en main par les anciens fondateurs : Lewis Trondheim, David B., Killhoffer, ...

 

L'Association se démarque nettement des maisons traditionnelles par sa structure collégiale, ses choix éditoriaux avant-gardistes, la primauté des principes esthétiques dans l'impression des planches...

En témoinge l'épineuse question de l'étiquettage de codes-barres dont les BD de l'Association étaient dépourvues jusqu'en 2011...

 

« L’association se refusant à imprimer sur ses livres des « codes-barres » tout aussi inesthétiquement disgracieux qu’éthiquement déplaisants ; et devant néanmoins, pour des raisons de logistique devenus inévitables, se résoudre à les faire figurer sur ses ouvrages au moyen d’étiquettes autocollantes, vilaines, onéreuses et agaçantes ; tient à préciser que lesdites étiquettes ont été étudiées pour que leur colle n’abîme pas la couverture des livres, et qu’il est donc du devoir du lecteur de les décoller du livre après acquisition, puis de les détruire avec rage et jubilation en chantant à tue-tête : « l’humanité ne sera heureuse que le jour où le dernier bureaucrate aura été pendu avec les tripes du dernier capitaliste ! »


...ce à quoi Lewis Trondheim finira par rétorquer sur le blog de L'Association :

 

« Fichus codes-barres - L’impression des étiquettes codes-barres auto-collantes coûtant entre 15'000 et 20'000 euros par an à l’Association, il a été décidé d’économiser cet argent et d’imprimer les codes-barres sur les livres. Que ceux qui veulent pendre des bureaucrates avec les tripes des fonctionnaires ou inversement s’en chargent eux-mêmes. »

 

Un seul bémol sur cet ouvrage de François Ayroles : les private jokes le rendent nettement moins intéressant pour ceux qui ne connaissent pas l'histoire de la maison d'édition et de ses auteurs.

 

 

 

Fables scientifiques - Darryl Cunningham

 

© Darryl Cunningham / Cà & Là

Titre : Fables scientifiques

Scénariste : Darryl Cunningham

Dessinateur : Darryl Cunningham

Editeur : Ca & Là

Date d'édition : Mai 2012

 

PITCH DE L'EDITEUR

Darryl Cunningham essaie de s’expliquer le Monde depuis son plus jeune âge…

Aujourd’hui adulte, il s’applique à chercher continuellement des preuves scientifiques de phénomènes qui nous entourent ; de mythes que certains cultivent ; de croyances qu’on nous inculque. 

Avec méthodologie et précision, dans ces Fables scientifiques, il nous démontre par exemple, que l’homéopathie n’est qu’une vaste fumisterie ; nous explique le réchauffement climatique et les polémiques qui l’accompagnent.

Toujours très documenté et référencé, Darryl Cunningham nous donne quelques clés de compréhension pour appréhender au mieux notre environnement.

Instructif !

   

 

« Ce livre est pro-science et pro-pensée critique […] la science n’est pas une question de foi ; ce n’est pas un point de vue parmi d’autres. La science est vérifiable et résiste à l’épreuve du temps. Tout ce qui ne fonctionne pas dans la science s’écroule ; ce qui subsiste, c’est la vérité. »

 

Sympathique plaidoyer pour la science et l’esprit critique. Darryl Cunningham brandit l’étendard du processus scientifique pour déconstruire les légendes urbaines, les croyances populaires et les vérités montées de toutes pièces par les pouvoirs des lobbyistes et des médias.

De quoi faire piétiner de rage les tenants des médecines parallèles plutôt douteuses, ceux qui croient encore que le vaccin ROR favorise l’autisme, cette bande d’énergumènes qui prêchent inlassablement le canular lunaire, les climat-sceptiques, ceux qui croient que la théorie de l’évolution est une hérésie…

Bref, tous ceux qui s’acharnent à nier des vérités démontrées « au nom d’idéologies et de dogmes ».

 

L’auteur déplore que des vérités scientifiques et une raison trop souvent piétinées par  l’émotionnel, le sensationnel, les théories de la conspiration, les lobbyistes… que les médias ne font parfois qu’attiser.

 

« Il semblerait qu’une histoire émouvante combinée à une forte conviction puisse l’emporter sur n’importe quel nombre d’études scientifiques. »

 

« Les entreprises du tabac ont réussi à troubler les eaux de la recherche scientifique en se donnant les moyens légaux de s’opposer à la législation […] ces techniques ont été récupérées avec brio par les industries du gaz et pétrolières, afin de semer le doute sur la réalité du changement climatique. Cette approche s’est révélée incroyablement efficace. Et elle a été épaulée par les médias qui ont donné aux deux camps un poids identique sans se soucier de savoir si l’argument était marginal, et non scientifique. »

 

Avec des conséquences parfois dramatiques…

La politique de "Dr Betterave", Manto Tshabalala-Msimang de son vrai nom, ex-ministre sud-africaine de la Santé qui prônait un cocktail à base d’ail, de citron et de betterave pour combattre le sida aurait fait quelques... 300'000 victimes…

 

Graphiquement… ne vous attendez pas à du Rosinski ou du Bilal… Vous l’aurez compris, l’intérêt de cet ouvrage n’est pas dans le scénario ou le graphisme. Cette BD se présente comme une BD documentaire tissée d’exemples, d’illustrations, de faits scientifiques, riche en documentations  sur les différents thèmes exposés.

Au-delà des exemples, volontairement provocateurs et dans l’air du temps, l’objet de la BD est de défendre le processus scientifique, de questionner le rôle des médias dans le déni de la science. L’auteur s’interroge sur la perte de terrain de la légitimité scientifique au profit d’autres formes de légitimité, sur le recours croissant à l’argumentation (notamment émotionnelle) au détriment de la démonstration scientifique.

 

« Au XXIème siècle, est-ce trop demander aux journalistes de procéder à une vérification des faits ? Et aux rédacteurs en chef de confier les articles scientifiques à des journalistes qui connaissent le sujet ? Est-ce trop demander ? »

 

Une très bonne lecture qui va bien au-delà des exemples abordés et nous rappelle avec sagesse qu’il faut savoir accepter d’abandonner ses croyances…

 

 

L'étranger d'Albert Camus - José Muñoz

 

© José Muñoz / Futuropolis / Gallimard

Titre : L'étranger

D'après l'oeuvre de : Albert Camus

Dessinateur : José Muñoz

Editeur : Futuropolis

Date d'édition : Mai 2012

 

PITCH DE L'EDITEUR

Sur une plage d’Alger, l'étranger Meursault a tué un homme. Un arabe. À cause du soleil, dira-t-il, parce qu'il faisait chaud. On n'en tirera rien d'autre. Rien ne le fera plus réagir. Comme si, sur cette plage, il avait soudain eu la conscience de n'être sur la terre qu'en sursis, sans auncun espoir de salut...
Quand José Muñoz rencontre Albert Camus... Le roman dans son texte intégral accompagné de plus de 50 illustrations.

Une édition prestigieuse pour un immense roman !
Paru il y a 70 ans, L'Étranger a établi d'emblée Albert Camus comme un immense écrivain. En 1957, il obtiendra le Prix Nobel de littérature pour l'ensemble de son oeuvre. En 1999,  L'Étranger sera élu meilleur livre du XXe siècle ! C'est dans sa propre lecture de ce roman que nous convie José Muñoz. Ses dessins, incisifs et subtils, participent de l’ émotion de l’écriture et nous entraînent dans les méandres de cet étranger...

 

 

Une très belle occasion de relire (ou de découvrir) le texte d'Albert Camus illustré par l'argentin José Muñoz, auteur du superbe Carlos Gardel.

Attention : ce n'est pas une version transposée en BD mais bien une illustration de la dernière édition de L'étranger.

En noir et blanc et tout en ombres et en lumières.

Quelques extraits dessinés (ne pas hésiter à cliquer sur les images pour les voir plus en détail) qui vous évoqueront très certainement l'histoire de Meursault, l'enterrement de sa mère, ses errances dans Alger, son indifférence au monde :

 

Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile : "Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués." Cela ne veut rien dire. C’était peut-être hier.


L’asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d’Alger. Je prendrai l’autobus à deux heures et j’arriverai dans l’après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J’ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n’avait pas l’air content. Je lui ai même dit : " Ce n’est pas de ma faute." Il n’a pas répondu. J’ai pensé alors que je n’aurais pas dû lui dire cela. En somme, je n’avais pas à m’excuser. C’était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il me verra en deuil. Pour le moment, c’est un peu comme si maman n’était pas morte. Après l’enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle.

 

J’ai pris l’autobus à deux heures. Il faisait très chaud. J’ai mangé au restaurant, chez Céleste, comme d’habitude. Ils avaient tous beaucoup de peine pour moi et Céleste m’a dit : "On n’a qu’une mère." Quand je suis parti, ils m’ont accompagné à la porte. J’étais un peu étourdi parce qu’il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois.

 

J’ai couru pour ne pas manquer le départ. Cette hâte, cette course, c’est à cause de tout cela sans doute, ajouté aux cahots, à l’odeur d’essence, à la réverbération de la route et du ciel, que je me suis assoupi. J’ai dormi pendant presque tout le trajet. Et quand je me suis réveillé, j’étais tassé contre un militaire qui m’a souri et qui m’a demandé si je venais de loin. J’ai dit " oui " pour n’avoir plus à parler. 

 

 

 

Extrait de L'étranger - Albert Camus

       © José Muñoz / Futuropolis

 

 

 

A noter que les planches de la version américaine sont actuellement exposées à la galerie Martel, à Paris (voir le calendrier).

 

 



04/06/2012
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